Vous le savez sans doute : le nouveau Code des sociétés et des associations (« CSA ») est entré en vigueur il y a quelques mois, apportant son lot de changements. Le législateur souhaite ainsi offrir à la Belgique un cadre juridique plus compétitif, flexible et transparent. Même si le CSA met l’accent sur la simplification et la flexibilité pour les sociétés et associations, la transition entre l’ancien et le nouveau code reste complexe. C’est pourquoi BestValue a analysé pour vous les nouvelles règles relatives au mécanisme de rachat d’actions propres dans les sociétés à responsabilité limitée (« SRL », qui remplacent les SPRL). Ce mécanisme peut en effet jouer un rôle clé dans la réorganisation d’une société en vue de sa cession.
Le nouveau code des sociétés et associations
Commençons par quelques nouveautés introduites par le CSA, qui vous aideront à mieux comprendre la suite de cet article.
Depuis le 1er janvier, les dispositions impératives du CSA s’appliquent automatiquement à votre société, même si vous n’avez encore entrepris aucune démarche auprès de votre notaire. Le CSA intègre aussi plusieurs dispositions supplétives. Pour en bénéficier, vous devrez adapter vos statuts, une obligation à remplir au plus tard pour le 1er janvier 2024.
Parmi les changements majeurs pour les SRL, le CSA supprime la notion de capital social. Pour compenser cette disparition et renforcer la protection des créanciers, toutes les distributions (bénéfices, réserves, remboursements d’apport, etc.) doivent désormais satisfaire à un double test :
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Solvabilité : après la distribution, l’actif net de la société ne peut pas être ou devenir négatif ;
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Liquidité : la société doit pouvoir continuer à honorer ses dettes pendant au moins douze mois.
Le rachat d’actions propres
Même si le CSA conserve la notion de rachat d’actions propres telle que nous la connaissions, il en assouplit considérablement les règles :
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Auparavant, le Code des sociétés limitait le rachat à 20 % des actions représentatives du capital souscrit. Désormais, c’est l’assemblée générale qui détermine le nombre d’actions à racheter et la fourchette de prix, tout en laissant la possibilité d’intégrer un plafond dans les statuts.
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Le CSA ne prévoit plus d’obligation pour les SRL d’annuler ou de céder les actions dans un délai de deux ans. Vous pouvez néanmoins inscrire des limitations dans vos statuts si vous le souhaitez.
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La société ne peut financer l’acquisition d’actions propres que si les montants concernés sont distribuables, en respectant le double test de solvabilité et de liquidité (voir plus haut).
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Le rachat ne peut porter que sur des actions entièrement libérées.
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L’offre d’acquisition doit concerner toutes les classes d’actionnaires, selon des conditions équitables pour chaque type d’actions.
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L’assemblée générale doit approuver la décision de rachat à la majorité des 75 %, contre 80 % auparavant.
Sur le plan comptable, la société doit inscrire au passif une réserve indisponible pour actions propres, équivalente à la valeur inscrite à l’actif. Cette réserve subsiste tant que les actions ne sont ni annulées ni cédées. Par ailleurs, les actions propres ne donnent droit ni au vote, ni aux distributions de bénéfices.
Son application dans la transmission
L’assouplissement des dispositions légales à respecter lors d’un rachat d’actions propres ouvre donc la voie à une plus large utilisation de ce mécanisme.
Il existe plusieurs cas de figure où le mécanisme de rachat d’actions propres peut s’avérer utile, notamment :
- le décès d’un actionnaire ;
- un conflit entre actionnaires ;
- une partie des actionnaires a la volonté de vendre ses actions et pas l’autre.
Reprenons par exemple le dernier point mentionné ci-dessus. Les actionnaires restants ne disposent pas toujours de fonds suffisant pour procéder à l’acquisition des actions de l’actionnaire souhaitant revendre. Lorsque leur souhait ne se porte pas non plus sur une ouverture du capital à des tiers, la société peut alors envisager de racheter les actions de l’actionnaire sortant et les conserver dans ses actifs, même si celles-ci sont supérieures à 20% du capital total.
Par la suite, les actionnaires pourraient envisager d’ouvrir leur capital à des tiers (employés ou investisseur hors de l’entreprise), ils auraient alors la possibilité de revendre les actions propres acquises précédemment.
A plus long terme et après avoir détruit les actions propres de la société, procéder au rachat des parts de l’actionnaire souhaitant vendre permet non seulement aux actionnaires restant d’augmenter le profit distribuable de leurs actions mais également d’être les seuls bénéficiaires de la croissance de leur société en cas de revente.
Vous l’aurez compris, le mécanisme de rachat d’actions propres, peu utilisé par les PMEs, mérite de gagner en popularité. Ne négligez pas l’importance de vous faire accompagner afin d’anticiper et d’appréhender au mieux les règles juridiques et les conséquences fiscales propres à votre situation, d’autant plus si cette opération fait partie du processus de préparation de votre société à une cession ultérieure.
Pierre Thiry